A l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes et comme un véritable symbole, l’esplanade du Musée Crozatier a été baptisée en l’honneur de Rose Valland, une résistante qui a notamment permis de récupérer 60000 œuvres d’art volées par les nazis pendant la seconde guerre mondiale. Une idée originale proposée par Huguette Portal, ancienne adjointe au maire chargée de la culture.
Ce lundi 8 mars le maire, Michel Chapuis accompagné de ses adjoints, Catherine Chalaye, Caroline Barre, et Jean-François Exbrayat, se sont rendus sur place pour la pose de la plaque, estampillée « Rose Valland ».
Une des premières archéologues d’Europe
L’esplanade en sable devant le musée Crozatier était jusqu’à présent sans nom. C’est désormais chose rectifiée. En cette Journée internationale des droits des femmes, une plaque a été posée, avec le nom d’une femme engagée pendant la seconde guerre mondiale: Rose Valland, celle par qui 60000 œuvres d’art ont pu être retirées des griffes des nazis.
Rose Valland, qui êtes-vous ?
Issue d’un milieu relativement modeste, Rose Valland est née le 1er novembre 1898 à Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs, une commune rurale du Dauphiné. Rien ne la prédestine à avoir le parcours professionnel hors-du-commun qui va être le sien. Douée en dessin et encouragée par ses professeurs, elle est passée par l’École nationale des beaux-arts de Lyon, puis l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris. Durant les années 1920, elle suit des cours d'histoire de l'art à l'École pratique des hautes études, à l'École du Louvre et à l'Institut d'Art et d'Archéologie.
En 1940, les musées français sont vidés, les nazis pillent les collections d'art privées, principalement celles de familles juives. Le musée du Jeu de Paume, à Paris, sert d'entrepôt pour les œuvres avant leur transfert en Allemagne. C’est dans ce musée que Rose Valland assure l’intendance.
Pendant ce pillage nazi, Rose Valland relève aussi précisément que possible le mouvement des œuvres qui transitent par le musée du Jeu de Paume, le nom des victimes spoliées, le nombre d'œuvres, leurs destinations, le nom des agents chargés des transferts, le nom des transporteurs, les marques des caisses, les numéros et les dates des convois, sans oublier le nom de l'artiste, de l'œuvre et ses dimensions
Pendant quatre ans, elle garde la trace des mouvements, de la provenance et de la destination des œuvres. Elle rédige des dizaines de fiches de manière scrupuleuse, déchiffre les papiers carbone allemands dans les poubelles du musée, écoute les conversations des officiels nazis.
De 1940 à 1944, elle est parvenu à cacher aux nazis, avec qui elle a pourtant des contacts réguliers et quotidiens, son important travail de prise de notes concernant la provenance et la destination des œuvres spoliées. Grâce à finesse et son intelligence, elle a réussi à collecter des informations essentielles, sans jamais éveiller les soupçons. Dans le cas contraire, elle aurait un destin fatal.
En 1944, la France est libérée. Rose Valland, quant à elle, rejoint l'armée française, promue capitaine et part en Allemagne pour retrouver les tableaux. Sur 100 000 œuvres, 60 000 sont récupérées, donnant naissance à la base de données MNR (Musées Nationaux Récupération) Rose Valland.
Elle continuera toute sa carrière à travailler pour la sécurité des œuvres d’art. Pendant la guerre froide, elle élabore un plan de sauvegarde, pour mettre à l’abri les œuvres en cas de conflit armé. Au musée Crozatier, son interlocuteur est Roger Gounot, conservateur de 1947 à 1979, qui visite des tunnels, en trace les plans… Le musée conserve leur correspondance.
4 tableaux au Musée Crozatier du MNR Rose Valland
Environ 2 000 œuvres (dont une moitié de peintures) sont alors confiés à la garde des musées nationaux, et mis en dépôt dans les musées français afin qu’ils soient vus par le public. Il s’agit de permettre leur identification par les propriétaires légitimes ou leurs ayants droit, et d’organiser leur restitution.
Ces tableaux, au statut très particulier, ont été nommés MNR pour Musées Nationaux Récupération. Le musée Crozatier en conserve quatre, visibles dans la salle des peintures du 17e siècle. Un cinquième tableau, le MNR 386, Triptyque de la Crucifixion, a été restitué en février 2018 aux ayants droit de ses légitimes propriétaires.