Jean Joulian, né le 25 octobre 1888 à Cannes, fut membre du réseau SOE Buckmaster.
Depuis son domicile à Aiguilhe, il a organisé des parachutages et le stockage d’armes.
Avec sa femme, il a également caché des officiers anglais chez lui.
Il fut arrêté et torturé par la Gestapo.
Il a été déporté au camp de concentration de Mauthausen en Autriche, d'où il sortira en mai 1945 dans un état de santé déplorable.
Il a fini sa vie dans sa région natale, il est décédé le 5 juin 1969.
Il sera décoré plusieurs fois pour ses actes de résistance.
Né le 25 octobre 1888 à Cannes (Alpes-Maritimes), Jean Joulian s’installe au Puy pendant l’entre-deux-guerres, après avoir vécu un temps à Boston, aux États-Unis. Il y exerce le métier de négociant en grains, principalement spécialisé dans la lentille verte du Puy. Il débute son activité au faubourg Saint-Jean, avant de s’établir chemin de la Roderie à Aiguilhe, dans une maison qui deviendra, durant l’Occupation, le quartier général de ses actions clandestines au sein de la Résistance. Son sens du devoir et son courage vont rapidement le conduire à jouer un rôle crucial dans la lutte contre l’occupant nazi.
Entête du papier de l'entreprise Joulian (Base LEONORE)
Durant l’été 1940, Virginia Hall, une journaliste américaine opérant sous le pseudonyme "Miss Marie", s’installe entre Vichy et Lyon. En réalité, elle est un agent secret au service des renseignements britanniques dirigés par le colonel Buckmaster. Lors d’un passage au Puy-en-Velay, elle fait la rencontre de Jean Joulian et de son épouse Marie-Louise. Elle leur confie une mission de la plus haute importance : mettre en place un réseau de résistance pour soutenir les opérations des services secrets britanniques. Jean Joulian accepte et adopte le nom de code "Jérôme". Il recrute rapidement Eugène Labourier, un transporteur local, connu sous le nom de code "Marius", qui devient son bras droit.
En juillet 1942, Jean Joulian organise un parachutage d’armes à Borne, qu’il dissimule ensuite pendant un long moment sous le poulailler de sa villa à Aiguilhe. En novembre de la même année, il recueille chez lui deux officiers britanniques gravement malades, qu’il héberge durant quatre mois.
Le 5 avril 1943, il est arrêté par la Gestapo à la suite de l’interpellation à Lyon de deux officiers en possession de documents compromettants, dont un inventaire détaillant les armes stockées dans sa propriété. Conduit à l’Hôtel Bristol du Puy pour y être interrogé, il refuse de parler. Il est alors transféré de nuit à l’Hôtel Terminus à Lyon, où il subit près de 72 heures de torture. Le 8 avril au matin, il finit par révéler l’emplacement des armes dissimulées dans le jardin de sa maison.
Ramené à Aiguilhe pour constater la saisie en présence des autorités locales, il y revoit son épouse, elle aussi arrêtée. Elle sera détenue pendant 45 jours avant d’être relâchée en mai. Jean et son épouse sont d’abord emprisonnés à Montluc, avant que Jean ne soit transféré à Fresnes, où il reste du 21 mai au 11 octobre 1943. À cette date, il est déporté vers le camp de Mauthausen, en Autriche. Ce n’est que le 5 mai 1945, après avoir enduré 20 mois dans ce camp de la mort, que Jean Joulian est enfin libéré. Il est rapatrié en France le 20 mai suivant, dans un état de santé extrêmement dégradé : il ne pèse alors plus que 43 kg, contre 102 kg au moment de son arrestation.
Attestation du CL Buckmaster (SHD Caen, AC 21 P, dossier n°577500)
Tandis que Jean Joulian coordonne les activités de résistance, son épouse Marie-Louise, surnommée "Éminence grise", joue un rôle essentiel dans l’ombre : elle assure la liaison entre Lyon et Le Puy-en-Velay et héberge des aviateurs alliés tombés en territoire occupé. En avril 1942, un officier radio anglais, Grégoire, séjourne chez les Joulian pendant six semaines. C’est également durant cette période que le commandant Philippe de Vomécourt, chef du réseau Buckmaster en France, leur rend visite sous les noms de Gauthier. En mai 1942, face à l’ampleur croissante des opérations, deux groupes de réception pour les parachutages sont créés : l’un anglais, dirigé par E.-M. Wilkinson (surnommé Alexandre) et Valérien, et l’autre français, dirigé par Jean Joulian et Eugène Labourier.
Le réseau, baptisé "Privet", repose également sur l’engagement de personnes de l’ombre. Juliette Chausse, la domestique des Joulian, prend en charge les aspects logistiques, tandis que Maurice Laurent, leur chauffeur, assure discrètement le transport d’agents anglais ou de matériel.
Ce dispositif illustre comment, dès 1941, des citoyens ordinaires se sont engagés avec courage pour combattre l’occupation nazie, en coopération étroite avec les services secrets britanniques. Jean Joulian a reçu, à titre posthume, de nombreuses distinctions honorant son courage et son engagement dans la Résistance : fait Chevalier, puis Officier et enfin Commandeur de la Légion d’honneur (décrets des 9 mai 1946, 19 avril 1958 et 31 juillet 1959), il s’est également vu attribuer la Croix de guerre avec palme, la Médaille de la Résistance française avec rosette (décret du 25 avril 1946), ainsi que la Croix du Combattant volontaire de la Résistance. Il est reconnu comme Déporté résistant et a été incorporé dans les Forces françaises combattantes (FFC) avec le grade de lieutenant, et dans les Forces françaises de l’intérieur (FFI) avec le grade de capitaine.